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Suspension du droit de conduire : la CJUE limite l’effet de la sanction à l’État membre sur le territoire duquel est commise l’infraction

Transport - Route
11/10/2022
Un État membre peut refuser de reconnaitre et d’exécuter une décision de suspension du droit de conduire à l’égard d’un de ses résidents en raison d’une infraction routière commise sur le territoire d’un autre État membre où le permis de conduire a été initialement obtenu puis échangé par un permis remis par l’État membre de résidence normale. Telle est la teneur de la décision de la Cour de justice de l'Union européenne rendue le 6 octobre 2022.
À la suite d’infractions aux règles de la circulation commises sur le territoire bulgare par un requérant résidant en Espagne et titulaire d’un permis de conduire délivré par les autorités ibériques, en échange d’un permis bulgare, le tribunal de Sofia a décidé de la suspension de son permis de conduire pour 6 mois.

Le tribunal espagnol a refusé de reconnaître le jugement transmis et d’exécuter la peine de suspension du permis motivant notamment son refus sur le fondement de l’article 11 de la directive 2006/126/CE relative au permis de conduire.

La juridiction de renvoi bulgare considère que le principe de territorialité des lois pénales et de police énoncé dans cette disposition entre en conflit avec le principe de reconnaissance mutuelle des jugements en matière pénale, elle sursoit à statuer, requérant la Cour de justice de l’Union européenne.

Selon la CJUE, d'abord, la situation de l’espèce ne relève pas de l’article 11§2 dès lors que le titulaire du permis a échangé son permis obtenu dans un premier État membre par un permis remis par l’État membre de résidence normale. En effet, au sens de cette disposition, cette personne « ne doit plus être considérée comme étant ‘titulaire d’un permis de conduire délivré par un autre État membre’ ».

Ensuite, la Cour de Luxembourg précise la portée de l’article 11§4 au regard du principe de territorialité des lois pénales et de police. Cette disposition n’implique pas, selon elle, que l’État membre de résidence normale du titulaire du permis reconnaisse et exécute sur son territoire une décision de suspension du droit de conduire prononcée sur le territoire d’un autre État membre.

En effet, la Cour de justice rappelle que seul l’État membre qui adopte une décision de suspension du droit de conduire « est compétent pour assurer, sur son territoire, l’exécution d’une telle décision, même dans la situation ou le destinataire de celle-ci a sa résidence normale dans un autre État membre ».
 
Elle indique, enfin, que l'article 15 de la directive 2006/126/CE, qui prévoit une assistance mutuelle entre les États membres et un échange d'informations sur les permis, peut contribuer à l'exécution effective d'une décision avec, par exemple, la consignation sur le permis, par l’État de résidence normale, d’éventuelles mentions d’interdiction de conduire sur le territoire d’un autre État membre. 
Source : Actualités du droit