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Notion de période suspecte et possibilité d'annuler des remises de chèques opérées pendant cette période

Affaires - Commercial
27/05/2016
En cas de conversion d'une procédure de sauvegarde en redressement puis liquidation judiciaire et report de la date de cessation des paiements avant l'ouverture de la sauvegarde, la période suspecte, qui commence au jour de la cessation de paiements, ne peut comprendre la période d'observation de la procédure de sauvegarde.

Par ailleurs, des remises de chèques opérées pendant la période suspecte ne peuvent être annulées sur le fondement de l'article L. 632-2 du Code de commerce que si elles ont eu lieu dans le cadre d'un fonctionnement anormal du compte n'enregistrant que les remises à son crédit, seul cas où ces remises valent, en diminuant le solde débiteur du compte, paiement d'une dette échue au sens de ce texte.

Telles sont les précisions apportées par la Cour de cassation dans un arrêt du 18 mai 2016.

En l'espèce, une société a fait l'objet, le 25 juillet 2008, d'une procédure de sauvegarde qui a été convertie en redressement puis liquidation judiciaires les 28 novembre 2008 et 24 juillet 2009. Un jugement du 15 mai 2009 a reporté la date de cessation des paiements au 1er juin 2007. Le liquidateur a demandé l'annulation des versements effectués par la société sur un compte ouvert dans les livres d'une banque entre le 31 décembre 2007 et le 19 août 2008. Pour accueillir la demande d'annulation de l'ensemble des remises de chèques, l'arrêt d'appel (CA Riom, 18 juin 2014, n° 12/02991) retient que la banque avait connaissance de l'état de cessation des paiements de la société à compter de juillet 2008.

La Cour de cassation censure sur ce point les juges du fond au visa de l'article L. 632-2, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 18 décembre 2008 : en statuant ainsi, alors que, la période suspecte s'étendait du 1er juin 2007 au 25 juillet 2008, sans pouvoir comprendre la période d'observation de la procédure de sauvegarde, la cour d'appel, qui ne pouvait annuler l'ensemble des remises de chèques jusqu'au 19 août 2008 sur le seul fondement du texte susvisé, a violé celui-ci.

De même, la Haute juridiction censure l'arrêt d'appel au visa du même texte en ce qu'il a retenu, pour annuler les remises de chèques effectuées par la société sur son compte courant après la date de cessation des paiements et avant l'ouverture de la sauvegarde, que la banque ne pouvait plus ignorer, à compter de juillet 2008, la situation de sa cliente. Or, en se déterminant ainsi, sans rechercher si les remises de chèques antérieures au jugement de sauvegarde avaient eu lieu dans le cadre d'un fonctionnement anormal du compte n'enregistrant que les remises à son crédit, seul cas où ces remises valaient, en diminuant le solde débiteur du compte, paiement d'une dette échue au sens du texte susvisé, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Source : Actualités du droit