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Vers un devoir d’information renforcé de la banque à l’égard de l’assuré ?

Affaires - Assurance
12/09/2018
Manque à ses obligations, la banque qui n’informe pas les emprunteurs du caractère manifestement erroné des motifs de refus de garantie transmis par l’assureur.
En l’espèce, une banque consent des prêts à un couple qui, en garantie de ceux-ci, adhère au contrat d’assurance de groupe souscrit par la banque auprès d’une compagnie d’assurance. L’époux étant victime d’un accident vasculaire cérébral en février 2009, les emprunteurs sollicitent la prise en charge du remboursement des prêts par l’assureur. Celle-ci leur est refusée et les emprunteurs assignent la banque pour obtenir la mise en œuvre de leur garantie. Mis en cause, l’assureur accepte le principe de la prise en charge sous réserve que les conditions de la perte totale et irréversible d’autonomie soient remplies, ce qu’une expertise médicale confirme par la suite, datant cette perte d’autonomie à la date de l’accident. Par ordonnance du 19 septembre 2013, le juge de la mise en état a donné acte à l’assureur qu’il confirmait le principe de la mise en œuvre de la garantie, ordonné la mainlevée du prélèvement des échéances et condamné la banque à rembourser aux emprunteurs les mensualités reçues depuis l’accident. Les emprunteurs ont ensuite poursuivi l’indemnisation, par la banque et l’assureur, de leur préjudice financier et moral.

Refusant cette indemnisation, la banque opposait notamment que « si le banquier souscripteur d’une assurance de groupe est tenu, pendant l’exécution du prêt, d’une obligation de conseil envers son client, il n’est tenu ni de prendre parti sur le refus de garantie que l’assureur oppose à celui-ci, ni d’accomplir des démarches auprès de l’assureur pour l’inciter à accorder à son client une garantie qu’il lui a refusée par deux fois ». Cette argumentation semblait recevable, étant donné que la banque est déjà débitrice d’un devoir d’information et de conseil (fréquemment élargi) à l’égard de son client emprunteur à qui il propose une garantie. Ainsi, il a été retenu que la banque manque à ses obligations si elle n’a pas informé l’assuré de l’insuffisance de la garantie souscrite et de l’intérêt à souscrire une garantie plus étendue (Cass. 1re civ., 4 févr. 1997, n° 94-19.375). La jurisprudence est allée encore plus loin en reconnaissant au banquier un « devoir d’éclairer » l’emprunteur sur l’adéquation des risques couverts à sa situation personnelle (Cass. ass. plén., 2 mars 2007, n° 06-15.267, Bull. civ. ass. plén. n° 4).

Il semble que les juges de la Haute juridiction souhaitent aller encore plus loin, conférant un rôle à la banque qui dépasse celui de simple intermédiaire entre la compagnie d’assurance et l’assuré emprunteur. Ici, la Haute juridiction affine le rôle de la banque qui, non seulement doit vérifier les termes des échanges entre la compagnie d’assurance et l’assuré mais également informer l’assuré si les motifs de refus de garantie de l’assureur ne sont pas justifiés. En effet, la Cour de cassation retient, en l’espèce, que la banque a manqué à ses obligations en n’informant pas les emprunteurs du caractère manifestement erroné des motifs de refus de garantie transmis par l’assureur et qu’elle avait ainsi fautivement prélevé l’échéance d’octobre 2013. Elle en déduit l’existence d’un lien de causalité entre ces manquements et les préjudices financier et moral subis par les emprunteurs du fait de la prise en charge tardive du remboursement du prêt par l’assureur.
 
 
Source : Actualités du droit