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L’audition des experts par téléphone, c’est non !

Pénal - Procédure pénale
18/03/2019
Interprétant strictement les dispositions du Code de procédure pénale permettant de réaliser des auditions à distance, la Chambre criminelle de la Cour de cassation refuse qu’un expert témoigne, devant la cour d’assises, par un moyen de télécommunication exclusivement sonore.
Un homme est condamné, en février 2018, des chefs de viols et agressions sexuelles aggravés, à 14 ans de réclusion criminelle et à l’interdiction définitive d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs. Par un arrêt rendu le lendemain, la cour d’assises saisie a prononcé sur les intérêts civils.
Il ressort des mentions du procès-verbal des débats et de l’arrêt incident rendu le 9 février 2018, que l’expert psychologue, qui était en congés à l’étranger, mais en possession de ses rapports d’expertises contenus dans la mémoire de son ordinateur, a été entendu par téléphone.
 
L’accusé forme un pourvoi en cassation.
La défense invoque d’abord, un excès de pouvoir de la cour d’assises dès lors que lorsqu’une audition réalisée à l’étranger, y compris par un moyen de télécommunication, elle doit faire l’objet d’une demande d’entraide.
Elle fait ensuite valoir que le principe de l’oralité des débats, d’ordre public, implique la comparution physique des témoins et experts, sauf le recours à un moyen de télécommunication, dans les conditions de l’article 706-71 du Code de procédure pénale, dont les dispositions sont destinées à garantir la confidentialité et la fiabilité des transmissions. Il y aurait donc violation de la loi, en ce que la cour a procédé à l’audition de l’expert, par téléphone, sans que les dispositions précitées aient été respectées.
 
Au visa des articles 168 et 706-71, alinéa 2 du Code de procédure pénale, la Cour de cassation adopte une interprétation stricte des textes.
La Chambre criminelle estime en effet « qu'il résulte de ces textes que les experts cités doivent déposer devant la cour d’assises, soit en personne, soit par un moyen de télécommunication audio-visuel garantissant la confidentialité de la transmission ».
Or, en l’espèce, l’expert a été entendu par un moyen de télécommunication « exclusivement sonore, en l’espèce un téléphone ».
Cette modalité n’entrant pas dans le champ d’application des dispositions applicables, le président de la cour d’assises a méconnu les textes susvisés. Et, ce, même en l’absence d’opposition des parties. La cassation devait donc être prononcée.
Source : Actualités du droit