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Centrale nucléaire de Chinon : EDF condamné pour des dysfonctionnements

Environnement & qualité - Environnement
04/10/2019
L’entreprise et l’ancien directeur de la centrale sont reconnus responsables de plusieurs contraventions aux règles de sûreté, suite à un rapport accablant de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Les prévenus ont saisi la Cour de cassation qui a rejeté leurs moyens.
 
Une condamnation par les juges du fond

En avril 2014, une association avait déposé plainte contre EDF suite au rapport de l’ASN pour une quinzaine d’infractions à la réglementation. Parmi elles, se trouvaient: le stockage commun de produits incompatibles, l’omission de lever les points d’arrêt-surveillance au niveau d’une vanne, l’absence de traitement approprié d’un écart relatif à la présence de bore sur la tuyauterie d’une autre vanne (substance considérée comme hautement préoccupante en raison de ses caractéristiques reprotoxiques) ainsi qu’un écoulement d’eaux non traitées sur le sol d’un bâtiment.
Les prévenus avaient été condamnés en première instance et avaient conjointement avec le ministère public relevé appel. La cour d’appel d’Orléans avait confirmé le jugement. À noter cependant que l’ancien directeur avait été relaxé sur une des contraventions.

Des moyens insuffisants

Le pourvoi en cassation était constitué de trois moyens principaux.
Le premier soulignait que le rapport de l’ASN ne pouvait avoir valeur de preuve dans le cadre de contraventions nucléaires. La cour de cassation a été très directe dans sa réponse : « les procès-verbaux établis par l’ASN constituent des éléments de preuve qui, soumis au débat et n’étant pas le fruit de procédés déloyaux, sont parfaitement admissibles ».
La Cour de cassation vient rappeler un principe de base du droit pénal : la liberté de la preuve.
La cour va examiner les deux autres moyens conjointement.
Le deuxième moyen était orienté autour de la question du manque de clarté et de définition des contraventions dans la loi. La cour d’appel n’aurait pas légalement motivé sa décision en ce qui concerne le manquement aux règles de gestion des écarts prévues par les articles 2.6.1 et suivants de l’arrêté du 7 février 2012 (Arr. 7 févr. 2012, NOR : DEVP1202101A, JO 8 févr.), qui prévoit les règles d’étanchéité uniquement pour les tuyauteries de transport. En effet, la tuyauterie mise en cause dans l’infraction n’était pas de ce type.
Le troisième moyen concerne les produits entreposés ensemble alors qu’ils étaient incompatibles. Selon les requérants, la cour d’appel aurait dû reconnaitre la qualité de déchets à ces produits et a ainsi méconnu les dispositions de l’article 6.2 de l’arrêté du 7 février 2012. Dans une seconde branche de ce même moyen, les requérants arguaient que les personnes morales sont pénalement responsables uniquement des infractions commises par leur organe ou représentant et qu’ainsi, en relaxant l’ancien directeur de la centrale sur une des contraventions sans relaxer la personne morale, la cour d’appel avait violé l’article 121-2 du code pénal.
La cour de cassation rejette ces moyens aux motifs suivants :
  • le champ d’application de l’article 6.2 de l’arrêté du 7 février 2012 comprend les déchets ;
  • la relaxe de l’ancien directeur de la centrale faisait suite à une condamnation irrégulière puisque les dispositions supposément violées n’étaient plus en vigueur et qu’en tant qu’organe défaillant de la société au moment des faits (puisqu’agissant en personne morale d’EDF), il emporte la culpabilité de la société.
Source : Actualités du droit