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Saisies pénales : la proportionnalité de la valeur du bien saisi à l’instrument de l’infraction exigée

Pénal - Procédure pénale
13/11/2019
La Cour de cassation vient rappeler les conditions de confiscation des biens meubles ou immeubles. Elle précise notamment que la valeur du bien saisi ne doit pas excéder celle de l’instrument de l’infraction.
Un juge d’instruction a ordonné la saisie, entre les mains du notaire, du produit de la vente par une SCI, gérée par une personne mise en examen du chef de proxénétisme aggravé, de deux ensembles immobiliers ainsi que de lots d’un troisième. Quelques jours plus tard, le juge a ordonné la saisie en valeur, entre les mains du même notaire, du solde créditeur de la vente de ces immeubles. La SCI a interjeté de ces décisions.
 
La Cour d’appel rappelle que le mis en examen encourt la saisie et la confiscation en valeur des biens dont il est propriétaire ou dont il a la libre disposition, sous réserve de ses droits s’il est de bonne foi. Ainsi, les immeubles litigieux et le produit de leur vente sont à leur disposition, la SCI ne pouvant être considérée comme propriétaire de bonne foi, et ces immeubles constituent le lieu des faits reprochés au gérant. Pour ordonner une saisie en valeur, il est nécessaire que la valeur du bien en question soit en corrélation avec le montant des gains issus de l’infraction susceptible d’être constituée.
 
Le mis en examen invoque la disproportion des saisies ordonnées par le juge d’instruction, qui sera validé par les juges du second degré qui décideront d’infirmer les ordonnances attaquées, de cantonner la saisie à une certaine somme et ordonneront la restitution à la SCI du surplus du produit de la vente.
 
Un pourvoi est formé par le procureur général, qui sera validé par la Cour de Cassation.
 
Elle affirme que selon les articles 706-141-1 et 706-153 du Code de procédure pénale, « au cours de l’information judiciaire, le juge d’instruction peut ordonner la saisie des biens ou droits incorporels dont la confiscation est prévue par l’article 131-21 du code pénal ; que la saisie peut être ordonnée en valeur ». L’article 131-21 du Code pénal dispose lui que « la confiscation porte notamment sur les biens meubles ou immeubles, quelle qu’en soit la nature, divis ou indivis, ayant servi à commettre l’infraction ou qui étaient destinés à la commettre, et dont le condamné est propriétaire ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition ; que la confiscation peut être ordonnée en valeur ».
 
La Haute juridiction déduit de ces textes que « peuvent être saisis en valeur les biens ou droits incorporels dont le mis en cause est propriétaire ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition, dont la valeur représente celle des biens ayant servi à commettre l’infraction ou qui étaient destinés à la commettre »
 
Le juge d’instruction doit dans ce cas :
  • « s’assurer que les conditions de la confiscation de l’instrument de l’infraction prévues par le deuxième alinéa de l’article 131-21 du Code pénal étaient réunies au moment de la commission des faits »
  • « vérifier que la valeur du bien saisi n’excède pas celle de l’instrument de l’infraction, enfin, lorsqu’une telle garantie est invoquée, d’apprécier le caractère proportionné de l’atteinte portée au droit de propriété de l’intéressé au regard de la gravité concrète des faits et de sa situation personnelle ».
Pour censurer l’arrêt, elle précise, in concreto, que les immeubles avaient servi à commettre le délit poursuivi et qu’ils étaient à ce moment à la libre disposition du gérant de la SCI, cette dernière n’étant pas de bonne foi. Et les sommes saisies par le juge d’instruction représentaient la valeur de l’instrument de l’infraction.
Source : Actualités du droit