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Covid-19 et réassurance des risques d’assurance-crédit : la caisse centrale de réassurance se dote de la garantie de l’État

Affaires - Assurance
15/04/2020
Le décret n° 2020-397 du 4 avril 2020 autorise l’État à apporter sa garantie à la caisse centrale de réassurance (CCR) pour la réassurance des risques d’assurance-crédit des PME et des ETI. Cette garantie se concrétisera par l’offre de trois compléments d’assurance-crédit proposés par les assureurs à tous leurs assurés français (Minefi, communiqué presse, 10 avr. 2020).
 
Selon les termes de l’alinéa 1 de l’article 7 de la loi n° 2020-289 du 23 mars 2020 de finances rectificative pour 2020 « la caisse centrale de réassurance, agissant avec la garantie de l'État, est habilitée à pratiquer les opérations d'assurance ou de réassurance, intervenant avant le 31 décembre 2020, des risques d'assurance-crédit portant sur des petites et moyennes entreprises et sur des entreprises de taille intermédiaire situées en France ainsi que des engagements pris au titre du g de l'article L. 231-13 du code de la construction et de l'habitation ». En même temps, l’alinéa suivant laisse le soin à un décret postérieur de préciser « les conditions d'exercice de cette garantie ».
Ledit décret est paru au Journal officiel le 5 avril « en vue de définir les modalités d'octroi de la garantie de l'État aux opérations de réassurance de certains risques d'assurance-crédit effectuées par la Caisse centrale de réassurance » (D. n° 2020-397, 4 avr. 2020).

Pour mémoire, rappelons que l’alinéa 4 de l’article 7 précité circonscrit d’emblée le montant de la garantie à 10 milliards d’euros. Outre la limite dans le temps – opérations intervenant avant le 31 décembre 2020 – mentionnée à l’alinéa 1.

Focus sur la CCR

La caisse centrale de réassurance est une société privée de réassurance intégralement détenue par l’État qui a pour objet la réassurance des risques ordinaires mais surtout des risques exceptionnels, difficilement assurables par les entreprises d’assurance.Tel est par exemple le cas des catastrophes naturelles : la CCR propose aux assureurs des contrats de réassurance qui vont limiter leur exposition aux risques. Dans ce cas précisément, l’État – qui détient à 100 % la CCR – apporte une garantie illimitée à cette dernière ce qui permet la couverture de ce type de sinistres exceptionnels.

Deux séries de garanties

Concrètement, le décret concerne deux séries de garanties : les garanties complémentaires et les garanties de substitution.

Les garanties complémentaires sont celles qui ne sont pas obligatoires tandis que les garanties de substitution ont pour objet de transférer tout ou partie du risque assurantiel d’une entreprise d’assurance à une autre. En outre, « pour chaque catégorie, les opérations de réassurance font l'objet de traités de réassurance distincts conclus avec les entreprises d'assurance, fixés par la Caisse centrale de réassurance selon les usages et méthodes du marché de la réassurance, et précisant les conditions particulières notamment tarifaires » (D. n° 2020-397, 4 avr. 2020, art. 2).

En matière des garanties complémentaires, « la garantie de l'État n'est acquise que dans la mesure où l'exposition de la CCR est au plus égale, pour chaque risque réassuré, à celle que l'assureur-crédit cosignataire du traité de réassurance conserve à sa charge sur ce même risque » (D. n° 2020-397, 4 avr. 2020, art. 3). À titre exceptionnel, et uniquement pour les engagements pris au titre du g de l'article L. 231-13 du Code de la construction et de l'habitation, l’État peut octroyer sa garantie pour une exposition supérieure « sur proposition du directeur général de la caisse et après accord du ministre chargé de l'économie, pour autant que l'assureur-crédit conserve une exposition sur le risque correspondant » (D. n° 2020-397, 4 avr. 2020, art. 3).

Quant aux garanties de substitution, « la garantie de l'État n'est acquise que dans la mesure où les garanties délivrées par les assureurs-crédit couvrent un risque dont la probabilité de défaut à un an associée, telle qu'évaluée par l'entreprise d'assurance à la date de souscription de la garantie, se situe entre 2 % et 6 % et que les garanties sont délivrées à un fournisseur contre le risque de non-paiement de ses encours de crédit client, lorsque : le fournisseur garanti a reçu une notification de cessation de garantie sur un client donné par son assureur-crédit ; le fournisseur garanti ou sollicitant une garantie a reçu une notification de refus de garantie sur un client donné par son assureur-crédit » (D. n° 2020-397, 4 avr. 2020, art.  4).

Et le dernier alinéa de l’article ajoute une condition supplémentaire : « la garantie de l'État n'est acquise que dans la mesure où l'assureur-crédit conserve à sa charge, pour chaque risque réassuré, une part minimale de risque et où la quotité garantie par l'assureur-crédit est au maximum de 80 % du risque correspondant ».

Les opérations de réassurance des risques d'assurance-crédit, qu’elles concernent les garanties complémentaires ou de substitution devront être retracées au sein d'un compte distinct ouvert dans les livres de la CCR (D. n° 2020-397, 4 avr. 2020, art. 6).

Garanties pour les PME et ETI en France

Ce décret, qui concerne les petites et moyennes entreprises (PME) et les entreprises de taille intermédiaire (ETI) situées en France, de même que des engagements pris dans le cadre des contrats de sous-traitance en matière de construction (g de l’article L. 231‑13 du Code de la construction et de l’habitation précité), autorise donc les pouvoirs publics à apporter leur garantie à la CCR pour la réassurance des risques d’assurance-crédit.
Une mesure bienvenue et nécessaire dans le contexte actuel où les entreprises concernées souffrent le plus des restrictions imposées afin d’enrayer l’épidémie.
C’est par ailleurs le point sur lequel insiste le communiqué de presse en date du 10 avril du Ministère de l’Économie et des Finances : « l’assurance-crédit joue un rôle économique essentiel, en couvrant les entreprises, notamment des PME et ETI, contre le risque de défaillance des clients auxquels elles accordent des délais de paiement, et ainsi, en sécurisant leur trésorerie ».

Trois produits

Le communiqué en question va plus loin en énonçant notamment que le dispositif d’assurance-crédit prend la forme de compléments d’assurance-crédit et se décline en trois produits « proposés par les assureurs à tous leurs assurés français :
  • Cap, qui offre une garantie complémentaire d’assurance-crédit domestique, venant s’ajouter à la garantie classique de l’assureur;
  • Cap+, qui offre une garantie d’assurance domestique de substitution lorsque la contrepartie n’est plus assurable ;
  • CapFranceExport, qui offre les mêmes couvertures pour les créances export de court terme ».
Ces produits sont commercialisés depuis le 15 avril 2020.
Source : Actualités du droit